Cinq paysans militants socialistes et responsables ou anciens responsables syndicaux viennent de rendre publique une lettre
aux Présidents de la Région, du Département, de Nantes Métropole et au Maire de Nantes. Militants socialistes, ces hommes ont été de tous les engagements et combats de la gauche dans le
département depuis des décennies. Nous saluons cette prise de position claire et courageuse et souhaitons que leurs voix soient, enfin, entendues.
Messieurs les présidents, Monsieur le
maire,
Si l’entêtement suffisait à justifier un projet,
Notre-Dame-des -Landes serait réalisé depuis longtemps. La réaction de Jacques Auxiette à la lettre ouverte de Patrick Varin est un concentré de ce qui exaspère à juste titre les militants de
gauche opposés à l’aéroport de NDDL… Certains partisans de l’aéroport, de leur côté, supportent mal cette façon de réagir. On retrouverait d’ailleurs les mêmes arguments en réaction à l’interview
de Stéphane Hessel, dont la contribution pour le congrès PS a fait un score inattendu en Loire Atlantique.
Il n’y a jamais eu de véritable dialogue possible,
ni au sein du PS 44, ni avec les grands décideurs que sont le président de Nantes Metropole, le président de la Région, ou du département, avec la seule exception de M. Mareschal, qui a toujours
reçu les opposants.
L’étude indépendante, certes très concise, faite par
un cabinet d’audience internationale (DELFT) n’a jamais été étudiée par vous, Messieurs, sous prétexte qu’elle était financée sur leurs deniers personnels par des élus opposés au projet… Comme si
les études ayant conduit à la déclaration d’utilité publique n’avaient pas été financées par des fonds publics débloqués par des partisans du projet… Comme s’il n’était pas bien plus suspect que
le Préfet Hagelsteen, chargé de préparer l’appel public à la concurrence auprès des firmes intéressées par le Partenariat Public Privé à NDDL en 2008, ait pu depuis rejoindre le groupe Vinci
(...)
Fasse que les excès et les tromperies diffusées par
certains de nos grands élus ne sapent pas ce qui reste de confiance des citoyens pour le « personnel politique ».
Car enfin où sont les spécialistes de la guérilla
urbaine installés à NDDL ? Ce sont sans doute les jeunes « indignés », révoltés, comme on voudra, qui ont depuis 2 ou 3 ans créé des exploitations maraîchères sur des terres en friche, mis en
place un réseau de produits et services locaux, boulangerie collective, bibliothèque, produits de première nécessité… Tout cela ravagé par nos forces de l’ordre, lieux de vie détruits, légumes empoisonnés aux gaz de toute sorte, etc.
Comment ne pas comprendre que cet étalage de forces policières sans
grande efficacité produit l’inverse de l’effet recherché : retourner l’opinion de la population locale, exaspérée par les entraves à la circulation (barrages policiers, contrôles de papiers
etc..) outrée de voir des maisons habitables détruites ou murées en cette période où les sans-abri sont partout… La solidarité sur le terrain n’a fait que se renforcer… entre les paysans locaux,
ceux qui ont accepté de « signer » comme ceux qui résistent jusqu’au bout, avec les jeunes présents pour certains depuis 3 ans dans des lieux de vie qui ne doivent qu’à eux-mêmes, avec une grande
partie de la population et de leurs élus.
Comment peut-on affirmer que tous les recours sont épuisés, alors
que deux ne sont pas encore jugés- à moins que le résultat ne soit déjà un secret de polichinelle, et que d’autres sont à venir, puisque des élus tout aussi responsables que vous, n’accepteront
pas le passage en force après les conclusions de l’enquête loi sur l’eau ?
Comment peut-on affirmer que les travaux sont engagés, alors qu’il
n’y a pas eu de demande d’autorisation de démarrer des travaux, ni pour démolir, ni pour défricher, mais seulement pour les sondages archéologiques préalables ?
Comment pouvez vous ignorer les conclusions de la commission
d’enquête qui recommande de ne rien enclencher d’irréversible avant qu’une commission scientifique indépendante ait validé la méthode de compensation environnementale proposée par les porteurs de
projet ?
A quoi cela sert – il de relever le score d’Eva Joly à NDDL, en
occultant le score beaucoup plus important du Front de Gauche, plutôt que de mettre en évidence que les opposants à l’aéroport dans leur grande majorité, ont contribué à l’élection de François
Hollande, qu’ils ont fait preuve pour certains d’une grande maturité politique en jugeant que la priorité était de remettre la gauche au pouvoir…
Fasse que votre politique de l’entêtement, du fait accompli, et
votre volonté de faire croire à l’irréversible n’amènent pas tous ces militants, tous ces jeunes, à désespérer du socialisme… Nous préférons ce combat-là, à la récupération du désenchantement par
les sirènes d’extrême droite, qui même dans nos terres de l’ouest, trouvent des oreilles attentives…
Nous militants socialistes, fiers de nos victoires récentes, mais attentifs et fermes sur nos positions, ne resterons pas que des fantassins bons pour
gagner les batailles… Une discussion est toujours possible. Comme le dit notre camarade Stéphane Hessel, il faut se demander « s’il n’y a pas une solution qui ne mettrait pas en conflit des
gens auxquels on doit l’amitié et le respect… Ceux qui protestent, ceux qui n’en veulent pas, ce sont de bons citoyens français, ce ne sont pas des malotrus, des voyous, au contraire ce sont des
gens qui ont bien réfléchi… »
Depuis la rédaction de cette lettre, il y a débat entre nous pour
savoir s’il faut la rendre publique… Depuis, aussi, il y a eu cette manifestation de 30 000 personnes venues s’opposer à ce projet et dire leur détermination à ne pas céder… Certains d’entre nous
y étaient, anonymes parmi la foule… Et encore une fois, la réponse des responsables de notre parti est une fin de non-recevoir, une reprise des vieux arguments…
Nous vous en conjurons, arrêtez de vouloir créer l’irréversible.
Acceptez, dans un premier temps entre socialistes, ensuite avec la coordination des opposants, de renouer un véritable dialogue, dans le respect de l’accord de mai 2012, dans le respect des
réserves de la commission d’enquête « loi sur l’eau », dans le droit fil du travail difficile mais essentiel qu’Alain Gralepois a accepté d’initier, pour que la coupure entre la gauche paysanne,
les militants progressistes engagés dans la lutte et notre parti ne soit pas définitive… »
30 novembre 2012
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